VALENCE d’AGEN
EXTRAIT du DISCOURS PRONONCE PAR Mgr. THEAS le 8 Octobre 1944 à VALENCE d’AGEN.


Messieurs, Mesdames – En écoutant il y a quelques instants les souhaits de bienvenue de M. le Maire, souhaits dont je vous remercie très profondément, j’ai pensé au Maire de Valence d’Agen qui aurait dû m’adresser cette allocution inaugurale: Je veux dire à Mr. Jean BAYLET qui a été l’âme et qui reste l’âme de cette belle Cité de Valence d’Agen, M. Jean BAYLET qui, comme moi, le 9 Juin au matin, a été brutalement saisi par la Gestapo, M. Jean BaYLET,qui a été avec moi, détenu à la prison de St. Michel de Toulouse; M. Jean BAYLET dans le compartiment duquel je me suis trouvé pendant le très long voyage de 6 jours que j’ai fait de Toulouse à Compiègne; celui qui a été mon compagnon d’infortune avec lequel j’ai lié des relations de très profondes amitié, oui, c’est lui qui aurait du recevoir dans cette belle Cité de Valence d’Agen l’évêque de Montauban. Hélas il n’est pas parmi nous, il est parmi les absents, il est parmi les déportés qui sont partis du Camp de Compiègne, il est parti avec mon ami Monseigneur DESOLAGE; avec Mr. le Recteur DELTEIL, le Préfet du Lot-et-Garonne, il est parmi les victimes de la Gestapo, parmi ceux qui ont été arrachés à l’affection de leur famille, au sol de France, mais il est parmi les héros français, parmi ceux qui souffrent, ceux qui travaillent au rachat de la France; a la grandeur de notre nation. Je sais combien vous êtes fidèles au souvenir de votre Maire, et je sais que depuis qu’il est absent, il est plus près de vous. Je pense au jour où vous pourrez le recevoir et je m’invite pour le fêter avec vous ce jour là.

Messieurs et Mesdames un évêque sortant de prison cela ne se voit pas tous les jours et c’est pourtant un Evêque sorti de prison qui est devant vous en ce moment. Pourquoi ai-je été en prison ? Vous en connaissez les motifs, et tout à l’heure, en des termes très aimables, Monsieur l’Adjoint au Maire de Valence vient de vous le rappeler. J’ai été en prison, parce que j’ai voulu être fidèle à ma Mission d’Evêque Français. Un Evêque est avant tout le défenseur de la Cité, de la Justice et de la vérité. Je n’ai pas voulu confondre le bien avec le mal, la vérité avec l’erreur, la justice avec l’injustice.

La première Fonction de la Justice c’est la sauvegarde des droits de l’homme qui sont pour nous un Don de Dieu. Or, chaque fois qu’il y a une injustice, l’Eglise à le devoir d’empêcher cette injustice et si elle ne peut être empêchée l’Eglise à le devoir d’agir et de protester.

Hier, sous l’occupation Allemande, nous avons vu l’ennemi s’accrocher à notre sol, nous enlever nos richesses, nos récoltes, mépriser les français, les maltraiter d’une manière brutale. Nous avons assisté à une série d’abominations; par exemple en 1942 nous avons vu les Juifs traités comme du vil bétail, des familles juives disloquées, les parents séparés des enfants, entassés dans les wagons à bestiaux sans tenir aucun compte de la dignité humaine. Nous avons vu l’occupant arracher notre jeunesse, l’envoyer en Allemagne et il y a à peine quelques mois, nous menacer d’arracher la jeunesse féminine – Nous avons vu des actes que réprouve la morale simplement humaine, des femmes, des maisons bourgeoises incendiées.

Extrait du discours prononcé par Mgr. THEAS
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