Page 50-66 du Livre « Avant que Mémoire ne Meure »

Le maquis Bir-Hakeim et les événements de Montpezat
Témoignage A. FIQUET (document 1) :

«Ce soir-là (1 au 2 mai 1944) Guy Pierlot m’avait demandé de monter la garde avec Petitjean, leur tour de garde se situant de minuit à deux heures du matin.

Un peu avant deux heures, nous sommes debout Roméo, Louis et moi pour observer le bombardement de Toulouse.

Pendant que nous regardons les explosions sur Toulouse qui embrasent au loin le ciel, nous entendons crépiter la mitraillette de Guy, et des fusées éclairantes partent tout de suite après.

A ce moment arrive par le chemin Petitjean complètement affolé qui nous crie: «Sauvez-vous, sauvez-vous, nous sommes attaqués !». Et il continue de courir au lieu de venir vers nous: il faut dire qu’il avait à peine 19 ans. Comme nous étions prêts à toute éventualité, nous ramassons nos paquetages et nous descendons dans le grand pré derrière la maison. Entre chaque fusée éclairante, nous progressons par bonds en groupe et nous atteignons le ruisseau. Comme Louis connaît le pays, nous marchons dans le ruisseau et nous nous enfuyons du côté de Saint-Vincent, dans les bois pas loin de Saint-Amand. »

Guy Pierlot continue de tirer sur une patrouille S.S. à l’orée du bois situé entre la ferme Verdier et la ferme Crantelle. Il y aurait eu six à sept tués et autant de blessés chez les Allemands. Cette action de retardement permet ainsi à ses camarades de s’échapper.

Tout en continuant à tirer, Pierlot, se réfugie dans la ferme Crantelle. Les S.S. l’y assiègent et mettent le feu au bâtiment vers 4 heures du matin. On retrouvera plus tard dans les ruines incendiées les restes calcinés de Guy PIERLOT.

Le fils CRANTELLE réussit à s’enfuir miraculeusement. Mais Marie-Louise CRANTELLE, sa mère, qui essayait, à son tour, de fuir, est abattue dans les blés avoisinants par une rafale de mitraillette.

Puis les Allemands incendient la ferme VERDIER, épargnant madame VERDIER en raison de son attitude secourable à l’égard de quelques soldats allemands.

A 8 heures du matin, ils sont à la ferme VALÈS qu’ils brûlent. Ils continuent par les maisons de Moïse RUAMPS et Henri MASSIP. Au lieu-dit Petit, ils mettent le feu aux fermes de COQUES André, Régis, Morane et COQUES Henri.

Avant de brûler chaque ferme, ils pillent, libérant cependant le bétail qu ‘ils emmènent en réquisitionnant les habitants pour le conduire. Les porcs sont surtout l’objet de convoitise. Ils les tuent sur place et emportent leur viande.

Non contents d’avoir tout pillé et incendié, les Allemands entraînent les propriétaires et les domestiques comme otages. Certains seront déportés en Allemagne d’où ils ne reviendront pas:

–    RUAMPS Henri, mort à Dachau, le 30 janvier 1945

–    VALES Germain, mort en Allemagne

–    CRANTELLE Albert, mort à son retour, le 31 mai 1945.

Tandis que la terreur se répandait dans la campagne, vers 9 h 30, d’autres groupes de S.S., montés sur chenillettes, prenaient possession du village de Montpezat. Les soldats procèdent aussitôt à des arrestations qui se combinent avec des exactions et des brutalités d’une extrême violence.

Le maire, Monsieur CROS, se voit arrêté comme tout le monde. Une jeune fille, Marie-Antoinette Orcival, est arrêtée en qualité de juive. Malgré ses protestations, elle sera déportée en Allemagne où elle mourra, épuisée, à Hambourg le 19 juin 1945, après la libération des camps.

Trois malheureux : NEGRIER, coiffeur, DUPUY, mécanicien, SALVADOR Benjamin, accusés d’avoir aidé à ravitailler les hommes de la Résistance, sont torturés dans la maison LAROQUE, près de la mairie.

Vers 15 heures, ayant accompli tous ces méfaits, les Allemands se retirent enfin. Tous les otages sont embarqués sur un camion et emmenés à Caussade. Certains d’entre eux seront renvoyés chez eux le soir-même ; mais plusieurs seront déportés en Allemagne dont tous ne sont pas revenus : DELPECH Félix, COSTES Jean, BARTHE Reine.

La population du village, terrorisée, qui s’était prudemment verrouillée à l’intérieur des maisons, commence à se risquer dehors. La vie reprenait peu à peu.

Mais vers 20 heures, survient une nouvelle alerte. Une deuxième occupation du village a lieu, toujours par la même brigade de S.S. Ces derniers, apparemment sous l’influence de boissons alcoolisées, vont faire preuve à nouveau d’un déchaînement de férocité. Les voilà qui courent en tous sens, hurlant comme des forcenés. Ils perquisitionnent de maison en maison, et leurs occupants sont poussés au dehors. Arrêtant toutes les personnes qu ‘ils rencontrent dans les rues, ils rassemblent les uns et les autres sur la place de la Mairie, fusils-mitrailleurs braqués sur eux. Pendant ce temps, la maison VALMARY brûle.

Des S.S arrêtent le chanoine GALABERT et l’abbé SCHAFF, prêtre lorrain, réfugié à Montpezat. Ils sortaient de l’église où était célébré l’office du mois de Marie. Les Allemands font monter le curé sur la place avec les hommes, et collent au mur le prêtre lorrain, mitraillette dans le dos. Pendant l’interrogatoire musclé, et en allemand, de ce dernier, les S.S. mettent le feu à deux maisons voisines, ainsi qu’au presbytère. Dans l’une des maisons, une petite fille de 3 ans, Lucette BARTHE, sera brûlée vive avec son grand-père Charles RATHBERGER. Une troisième personne, Jean COSTES, âgé de soixante ans, venant de Lapenche à Mon tpezat voir sa sœur, est arrêtée et probablement fusillée et jetée dans les flammes.

Quand toutes ces opérations sont terminées, les S.S. remontent dans leurs camions et s’en retournent définitivement à Caussade.

A la suite de ces événements épouvantables, Mgr THEAS, évêque de Montauban, adresse, le 6 mai, la lettre suivante au Commandant BLADLOW, chef de la Kommandatur :

«Mardi dernier la commune de Montpezat a été le théâtre d’événements tragiques.

Défenseur de la justice, gardien du droit naturel, je manquerais gravement à mon devoir si, en face de tels actes de terrorisme et de barbarie, je ne faisais entendre la protestation indignée de la conscience humaine et chrétienne…Le vainqueur a le devoir d’assurer l’ordre, et non de faire du désordre…Si le vainqueur pratique le terrorisme, il est disqualifié pour l’interdire…».

Un mois plus tard, dans cette même commune de Montpezat, un groupe de S. S. de même provenance, portait son action sur le hameau de Perches-Haut.

Le 6 juin 1944, vers 23 h, un tir de mitraillette se déclenche dans la côte de Perches, sur la R.N. 20 ; puis deux motocyclistes allemands lancent quatre fusées éclairantes. Peu de temps après, une centaine de S. S. environ, sur chenillettes, arrivent de Caussade. Des rafales de mitraillettes sont tirées vers les fermes du hameau, puis le feu est mis aux maisons DUTHIL, CAPPOT, RESCOUSSIÉ, COMBEL.

Neuf occupants furent retrouvés le lendemain, carbonisés sous les décombres. Deux avaient été tués alors qu’ils cherchaient à fuir.

Vers 2 h du matin, le moulin à vent qui dominait la colline de Perches avait été détruit par l’explosion d’une bombe.

Quelle raison les Allemands ont-ils donnée pour justifier cette épouvantable tuerie ? Ils ont prétendu que des signaux lumineux partaient de ce hameau. Fallacieuse accusation.

Le lendemain du massacre, Elise DUTHIL, seul témoin de la tuerie de Perches, déclare  » On m’a dit que c’est à cause de ma belle-mère. Elle avait l’habitude d’aller dans la cour de la ferme avec une lampe à pétrole, pour aller voir les bêtes, le soir venu. Mon beau-père la disputait parce que c ‘était le couvre feu. Il lui disait  » Tu les connais pas, les Allemands. Tu sais pas comme ils peuvent être mauvais  » . Il faut dire que lui a fait l’autre guerre. Donc la lampe, à ce qu ‘on m’a dit, ils croyaient que c’étaient des gens du maquis qui passaient par là. D’autres disent que c’est une dénonciation. Il paraît aussi que le débarquement les avait mis en colère.»

«De toute manière, écrit André FIQUET, il ressort que nous avons été dénoncés. Par qui ? encore aujourd’hui on ne peut émettre que des doutes.»

«Un individu, fortement suspect, réside alors à Montpezat. C’est un réfugié d’origine sarroise, René BROER, installé avec sa femme : VITRAINE Jeanne, née le 12/09/1913 à Cers dans l’Hérault et ses enfants. Cet homme est redouté pour son activité pro-allemande. Dévoilé comme indicateur, il sera, plus tard, arrêté par Tataouine qui le ramènera à Pech-Sec, dans le Camp Militaire de Caylus, dernière localisation du maquis Bir-Hakeim. Jugé et condamné à mort, il sera fusillé dans la combe de Pech-Sec. »

AVANT QUE MEMOIRE NE MEURE Tome1Page53

Recueillement devant la tombe des victimes du 2 mai 1944 à Montpezat (de gauche à droite) :

CABARROQUES, BÈS Maurice, SAUBESTRE, VET, VER Antonin, MASSIP, BAYROU, TRUQUET.

Témoignage J. DELOM :
« Dans la nuit du 1″ au 2 mai, les Allemands se rendirent aux Garennettes et mirent le feu à la maison Crantelle. Le docteur Larroque éveillé dans la nuit pour aller voir une femme en couches dans cette direction, comprenant la gravité de la situation, me fit avertir par Mme BEY-ROUNAT. Madame et monsieur BEYROUNAT, receveur des PTT, fidèles amis, m’avaient toujours aidé lorsque cela était nécessaire. Quelques instants après, j’ai pu voir les fermes s’allumer les unes après les autres.

Par la suite, je puis reconstituer le drame de la façon suivante : Guy PIERLOT, né le 16 mai 1924 à LAIFOUR (Ardennes) placé en sentinelle, voyant venir les Boches, tira pour prévenir ses camarades du danger. Le PC alerté par la fusillade, devant la force ennemie, dut chercher refuge dans les bois et les blés voisins. Le jeune Guy continua à vider ses chargeurs de mitraillette, tuant 7 Allemands, en blessant 6 autres. Serré de près sans doute, il se réfugia dans la ferme CRANTELLE où il fut carbonisé. Personne n’ignore la suite des événements.

Ayant fini leur sale besogne à la SALVETAT, les Allemands arrivaient vers neuf heures à Montpezat. Là, ils firent ramasser tous les étrangers, fouillèrent certaines maisons et emmenèrent 17 personnes. Ils partirent vers 17 heures. Tout le monde les croyait partis définitivement mais ils revinrent vers 21 heures, fous furieux, ivres, maltraitant les gens au passage, tirant à tort et à travers, semant la terreur.

Nous crûmes bien faire avec ma famille de changer de domicile et d’aller chez ma belle-sœur, dont la maison, entourée de jardins, permettait une fuite plus facile, le cas échéant… Une heure s’était à peine écoulée, lorsque nous vîmes des flammes dans la direction de notre maison. Cette fois, l’idée de fuir cet endroit trop dangereux me vint. Avec les membres de ma famille, nous franchissons un petit sentier et nous nous retrouvons en pleins champs sans être vus. Nous pensions nous rendre au lieu dit St-Etienne, à 6 kilomètres de Montpezat, à la ferme de M. FEUILLIERES, où nous savions être reçus à bras ouverts, malgré l’heure tardive.

Nous n ‘étions cependant pas rassurés, ayant laissé à Montpezat ma fille aînée, son mari et leur enfant âgée de 4 ans et demi. On apercevait toujours des incendies et nous nous demandions si les nôtres ne périssaient pas dans les flammes par représailles. Quelle nuit d’angoisses ! Tôt le matin, nous apprîmes qu ‘ils étaient sains et saufs, mais qu ‘ils avaient passé une très rude soirée.

Je devais me rendre à Montauban pour porter les papiers de Mlle ORCIVAL, arrêtée la veille. N’ayant pas de train assez tôt, je fis le trajet à bicyclette. Après avoir remis les papiers demandés, je me rendis chez monsieur LAPLACE où je rencontrais Monsieur VERGNES, Chef du secteur de Montauban. Nous étions en train de discuter quand on vint nous prévenir que la Gestapo était à nos trousses. Voyant le danger, au lieu de retourner à mon domicile, je me rendis à Toulouse. Au bout de trois jours, impatient de savoir ce qui se passait, je rentrai pour continuer ma tâche. Mais à partir de ce jour, nous couchions avec ma famille, dans une petite maison de campagne à cinq cents mètres du village, pensant être à l’abri de la Gestapo. Avec mes gendres, nous prenions la garde à tour de rôle.

Dans la nuit du 6 au 7 juin, vers 2 h 30, j’entendis la formidable explosion qui devait détruire le moulin de Pech-Agut. Je montai sur le tertre voisin et vis de grandes lueurs en même temps que claquaient les rafales de fusils-mitrailleurs. Pensant que les Allemands s’en prenaient encore à Montpezat, je redescendis quatre à quatre vers la maison faire lever ma famille et nous allâmes terminer la nuit dans la nature.

Le lendemain, je revins au village où j’appris la triste fin du hameau de Perches et la mort tragique de tous ses habitants, à l’exception d’un seul.

C’est alors que je fis une petite enquête sur le nommé BROER, mon locataire, qui parlait très bien l’allemand et que je soupçonnai de trahison. L’enquête étant concluante, je signalai le suspect au groupe du maquis qui vint le cueillir et le questionna, au lieu dit Pech-Sec ; après aveux, il fut fusillé sur place. »
L’affaire BROER
Dans la séance du 21 décembre 1965, le Tribunal des Pensions de Toulouse statue sur l’affaire BROER. Il reçoit trois dépositions : celle de Raymond DUCLOS, chef de la 7èmeCie A-S, et celles de deux agriculteurs de la commune de Montpezat : SALVADOR Benjamin et STRAGLIATI Louis.

Déposition de DUCLOS :

«Je maintiens ce que j’ai déjà dit au sujet de BROER. A la suite de l’attaque par les Allemands le 2 mai 1944 à Montpezat, nous cherchions à savoir qui avait pu leur indiquer l’emplacement du maquis. Après une longue enquête, c’est à la demande de Monsieur DELOM, chef de la Résistance à Montpezat, que nous sommes allés perquisitionner chez BROER. Il était absent et nous ne trouvâmes rien de compromettant. Mais sur les insistances de Monsieur DELOM, nous devions l’arrêter le soir-même dans une ferme des environs où, paraît-il, il se rendait assez, souvent. Les hommes que j’avais chargés de son arrestation, me l’amenèrent au maquis, dans le canton de Caylus. Il fut fouillé et interrogé par deux officiers de l’Etat-Major de Montauban. Nous trouvâmes sur BROER une carte à son nom écrite en allemand. Je ne participai pas à l’interrogatoire étant appelé ailleurs par ma charge. A mon retour, l’interrogatoire était terminé. Le Capitaine MARCUS me montrant la carte trouvée sur BROER, me dit qu’il s’agissait d’une carte d’auxiliaire de la Gestapo. Il ajouta : c’est un Allemand, il n’y aura qu’à l’exécuter. C’est ce que nous fîmes le lendemain matin. L’interrogatoire a été enregistré et le Capitaine MARCUS a pris le dossier à Montauban. Ce dernier a été tué plus tard devant AUTUN. Je ne connaissais pas BROER avant qu ‘on le mène au maquis. »

Déposition de SALVADOR :

«Je connaissais BROER depuis quelque temps. Il venait chez moi pour chercher du ravitaillement et me procurait parfois de fortes chaussures que j’appréciais beaucoup et que je mettais pour aller aux champs. Le 2 mai 1944, quand les Allemands sont venus piller et incendier à Montpezat, ils sont aussi passés chez moi. Ils ont pris tout ce qu’ils ont trouvé dans la basse-cour. J’habite à environ 2 km du village.

Quand BROER est revenu quelques jours après, nous avons parlé de cette attaque. Il m’a dit que ce n ‘était pas fini, car les grands coupables n ‘étaient pas encore pris. Je trouvais qu ‘il était bien renseigné et il m’a paru suspect.

En effet, les Allemands sont revenus et ont recommencé le pillage et encore incendié des maisons. Ils sont aussi venus chez moi et j’ai dû leur laisser prendre ce qu’ils voulaient.

Quand BROER est revenu, je lui ai fait part de ce que m’avait fait les Allemands. Il m’a fait alors un papier écrit en allemand, me disant qu’avec ce papier je n’aurais plus d’ennuis. Il me demanda même si je n’avais pas vu un camion rempli de maquisards et je lui répondis que je n’avais rien vu.

Le jour de son arrestation, car il a été arrêté chez, moi, il était venu pour me demander le papier qu’il m’avait déjà fait. Il l’a déchiré devant moi et m’en a fait un autre toujours écrit en allemand. C’était dans l’après-midi. Il allait repartir chez lui quand une voiture s’arrêta dans la cour. Trois maquisards en descendirent et dirent à BROER de les suivre».

Déposition de STRAGLIATI :

«Je soussigné STRAGLIATI Louis, fermier à Salabert, par Montpezat-de-Quercy, déclare que le nommé BROER vint le 3 mai 1944 (lendemain des sinistres de La Salvetat par les S.S.) prendre du linge de ma propriétaire, Mme V’ DELCASSE, qui se trouvait dans une chambre réservée par cette dernière.

Monsieur BROER me demanda de dire que c’étaient les S.S. qui l’avaient pris. Je lui répondis que je ne pouvais dire ainsi. «Peu importe, dit-il, tu diras que c ‘est moi».

A ces dépositions, il faut ajouter le témoignage d’André FIQUET :

«Début juillet 1944, alors que l’on venait d’arrêter BROER, mes chefs m’ont envoyé à Toulouse pour perquisitionner avec Genève, le domicile qu ‘avait BROER au Champ-du-Loup, vers Empalot. On cherchait des documents qui auraient établi la preuve que Broer travaillait pour les Allemands. On a tout fouillé. En vain».

Témoignage Henri DELPECH (document 2) :

«Pendant l’hiver 43-44, âgé de 17 ans, j’avais travaillé comme journalier dans diverses activités pour pouvoir m’acheter un vélo.

Je descends à Caussade chez le marchand de cycles DUCLOS, pour discuter de l’achat d’un vélo à crédit.

J’y rencontre ESCUDIE, commis de DUCLOS, et un petit à l’accent italien que je sus plus tard s’appeler MONFRINI.

Un peu avant Pâques 44, mes parents m’avaient dit : «Quand on vendra les agneaux, on paiera le reste». MONFRINI me demande : «Tu vends des moutons ?». Je lui réponds : « Mes parents».

Quelques jours après, MONFRINI monte voir mes parents pour discuter de l’achat de moutons destinés au ravitaillement des réfractaires cachés. Ainsi, j’ai connu MONFRINI, avec d’autres, il venait chercher 3 ou 4 agneaux morts à chaque fois et du vin.

Plusieurs fois, je les ai suivis. On passait par Lapenche, route de Septfonds, puis direction Caylus. Je crois que c’était à Vieille, mais je n’en suis pas sûr.

Début mai, je me trouve dans une ferme du côté de Septfonds où il y avait une quinzaine de gars, lorsqu’on nous dit qu’il s’était passé des événements à Montpezat.

Je rentre dans la journée avec Antonin Colmagro en moto jusqu ‘à Montalzat. De là, je descends à pied jusqu’au lieu dit Douât chez M. ROUX à environ 3 Km de Montpezat. Vers le soir, par un petit chemin, je monte au village voir ce qui s’y passe.

A l’entrée de Montpezat, au lieu-dit «Le Collège», je rencontre Mme SILLAIRE, la femme d’un facteur, qui me dit : «Où vas-tu, malheureux ? Les Allemands sont chez toi. Va-t-en vite !»

Je repars par le chemin du cimetière et je reviens à Douât. Le soir, nous avons vu brûler des maisons à Montpezat.

Je viens trouver COLMAGRO, à pied. Et nous repartons sur Vieille. Mais le camp était levé. Il n’y avait plus personne. Je reviens chez ROUX où je suis resté quelques jours, puis ai rejoint ma mère qui sétait réfugiée, après l’arrestation de mon père, au lieu-dit «Le Montet», une ferme inhabitée appartenant à M. TOULOUZE, où mes parents élevaient les moutons.

Là, je retrouve CASTELNAU (RAVITO). Je lui dis : «Je veux rejoindre le Maquis».

Il me donne rendez-vous à Lavaurette. Le soir, à vélo, nous arrivions à Richard.

Par la suite, pour des problèmes de ravitaillement, je passais régulièrement deux à trois jours à la ferme.

Ayant rencontré plusieurs fois BROER, qui parcourait constamment la campagne, celui-ci me fit la proposition suivante : «Fournis-moi trois à quatre moutons chaque semaine, et je fais libérer ton père».

Je signale le fait, le soir-même, à DUCLOS et à ESCUDIÉ.

Quelques jours après, BROER est arrêté. Interrogé, BROER m ‘a accusé de méfaits au

Maquis.

J’étais en train de sulfater une vigne, lorsqu’arrive une traction d’où descendent deux maquisards qui me disent :

« Nous avons arrêté BROER. Il te faut venir témoigner ce que tu as dit chez. DUCLOS». Nous montons à Pech-Sec. Dans la grande pièce du bas, BROER était assis sur une chaise, face à un jury de 4 à 5 personnes.

DUCLOS me dit : «Assieds-toi. Il te faut me répéter ce que tu as dit à mon commis ESCUDIÉ.»

«Broer m’a proposé de faire libérer mon père contre l’achat de moutons morts chaque semaine. »

Broer s’est alors écrié : «Mais non, je n’ai jamais proposé ça ! C’est toi qui es un salaud ! Je ne faisais pas de marché noir. »

L’interrogatoire a duré environ une heure : interrogatoire ferme, mais courtois, contrairement à ce qui a été affirmé plus tard. BROER n ‘était même pas attaché.
Il lui a été reproché d’être en contact avec la Kommandantur de Caussade, où il aurait été suivi. Il portait sur lui des papiers en allemand.

DUCLOS m’a alors dit : «Petit, on n’a plus besoin de toi. Que veux-tu faire ?»

«Je désire aller voir ma mère pour la rassurer. Je reviendrai demain. »

Le lendemain, avec RAVITO, à vélo, nous sommes remontés à Pech-Sec. BROER avait été exécuté.

Stèles Commémoratives
1 – Mémorial de la Salvetat
2 – Mémorial de Montpezat-de-Quercy
3 – Mémorial de Perches

Mémorial de La Salvetat

AVANT QUE MEMOIRE NE MEURE Tome1Page61
Aux Martyrs de La Salvetat Victimes de la barbarie allemande 2 Mai 1944
CRANTELLE Albert CRANTELLE Marie-Louise PIERLOT Guy PETIT Albert
RUAMPS Henri VALES Germain ROSETTE Pierre
FRANÇAIS SOUVIENS TOI

Mémorial de Montpezat-de-Quercy

AVANT QUE MEMOIRE NE MEURE Tome1Page62
Aux Martyrs de Montpezat-de-Quercy Victimes de la barbarie nazie 2 Mai 1944
DELPECH Félix COSTES Jean BARTHE Reine
FRANÇAIS SOUVIENS-TOI !

Mémorial de Perches

AVANT QUE MEMOIRE NE MEURE Tome1Page63

Aux Martyrs de Perches Victimes de la barbarie allemande 7 Juin 1944
BONNAYS Léonie BONNAYS Roland COMBEL Adrien COMBEL Antonin COMBEL Juliette COMBEL Marie
CAPPOT Henri DUTHIL Léon DUTHIL Maria RESCOUSSIÉ Antoine RESCOUSSIË Antoinette
FRANÇAIS SOUVIENS TOI

* 29-30 avril 1944 : sabotage de la voie ferrée au tunnel de Viandès.
* 2 mai 1944 : attaque du maquis Bir-Hakeim par les S.S. aux Garennettes.
* 6 juin 1944 incendie du hameau de Perches-Haut.
Itinéraires fléchés : trajets des colonnes allemandes.
DOCUMENT 1

AVANT QUE MEMOIRE NE MEURE Tome1Page65-1

AVANT QUE MEMOIRE NE MEURE Tome1Page66

Monsieur DELPECH Félix a été aidé par son fils Henri ; qui a ensuite rejoint Pech-Sec,

et a participé aux diverses opérations de la 7ème Compagnie.
DOCUMENT 2

Le maquis Bir-Hakeim-2
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