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Exceptionnel destin d’un patriote requis par le S.T.O. – La résistance en Tarn et Garonne

Pages 215-218 du Livre « La mémoire : Heurs et Malheurs »

Tome3-Memoire-heurs-et-malheursPage215Monument de Dortmun rappelant le sort des S.TO. (Allemagne)
Les exceptionnels destins de deux patriotes requis par le S.T.O.

Le 25 juin 1942 est instituée ce que l’on a appelé « la relève » : un prisonnier de guerre libéré contre trois ouvriers français acceptant de partir travailler en Allemagne.

Cette recommandation ne donne pas les résultats attendus malgré les appels de Laval et les pressions du gauleiter Sauckel. Son résultat négatif est à l’origine de la création,le 4 septembre de la même année, du service du travail obligatoire (S.T.O.).

Devant les exigences allemandes, pour 250 000 travailleurs, dans les six mois à venir, le service du travail obligatoire est proclamé, en février 1943. Les jeunes des classes de mobilisation 1940, 1941, 1942 iront obligatoirement travailler en Allemagne avec pour corollaire la suppression de la ligne de démarcation et le rattachement à l’administration française des départements du Nord et du Pas-de-Calais.

Le Tarn-et-Garonne sera frappé par cette obligation comme partout en France dès mars 1943. Certains jeunes pourront s’extraire de cette obligation en rejoignant les maquis parce que leur refus de partir en Allemagne en fait des clandestins. Mais les autres, qui ne peuvent le faire, tous les autres ?… De patriotes ils deviennent victimes. C’est le cas de mon camarade René Daunac, il est de tous ceux-là. L’AIlemagne, en édifiant un monument, reconnaît leur détresse (photo ci-contre). Ce monument érigé à Dortmun fut inauguré par un Montalbanais Roland Férrié, président de l’association nationale des S.TO. et le maire de la commune allemande.

René Daunac, après avoir participé au sabotage de son bateau le « Strasbourg », le 27 novembre 1942, sur lequel il se trouvait depuis le 27 novembre 1941  en qualité de mécanicien, est capturé sur le quai par la troupe allemande et dirigé par elle sur le centre de « Lagoubran » surveillé par les Allemands. Quelques jours avant le sabordage, l’ingénieur du service de sécurité du « Strasbourg » avait envoyé René Daunac sur le sous-marin « Glorieux » (celui qui a quitté Toulon le 27 novembre 1942  au moment de l’invasion de l’Arsenal par les Allemands). Léquipage n’étant pas unanime pour rejoindre Alger il sera désarmé à Valence en Espagne. Ce qui me permet de dire qu’à un jour près mon camarade loupe son départ vers les F.N.F.L.

C’est à Lagoubran que se constitue un groupe de cinq camarades pour fausser compagnie à l’occupant. Dans ce groupe se trouve René Daunac. Ils réussissent leur évasion et échangent leurs vêtements militaires de marins contre des vêtements civils avec les habitants de la Seyne. L’accoutrement civil ainsi obtenu leur permet de partir courageusement rejoindre Marseille en empruntant les sentiers difficiles des Alpilles. Une halte dans une vieille maison sur leur route abritant des réfugiés Espagnols qui les réconfortent leur permet de poursuivre leur marche de nuit vers le but qu’ils se sont assignés.

Arrivés à Marseille ils se présentent chez les parents de la fiancée de l’un d’eux, lesquels après les avoir bien accueillis procurent aux quatre autres des billets de la SNCF pour leur permettre de rejoindre Montauban et Toulouse, les régions dont ils sont originaires.

Quelques jours après son arrivée à Montech, René Daunac reçoit l’ordre de revenir à Toulon transmis par les gendarmes de la brigade pour y être démobilisé. Cette régularisation lui permet de rentrer en règle à Montech. C’est alors que le Colonel Rollin l’engage à travailler et le place comme garçon de ferme à Lacapelette-Durfort et à Castelmayran où il reçoit un message de la marine lui intimant l’ordre de rester sur place avant d’être rayé des cadres en juin 1943.

René Daunac est né en 1922 donc dans l’obligation d’aller travailler en Allemagne au titre du S.T.O. Quand il arrive dans ce pays il est dirigé vers la Silésie le 19 juin 1943, affecté à Hindenburg. Avant d’arriver dans cette ville, il a traversé celle de Gliwice où se trouve la station de radio diffusion d’où partit la guerre de 39/45, et où fut préparée l’invasion de la Pologne par la Gestapo en vue de l’augmentation de l’espace vital de l’Allemagne. Il est affecté dans une fonderie lourde en tant que manoeuvre avec ses camarades Mathaly et Lalanne. Dans cette usine, ils doivent travailler la nuit sans aucune protection: pas de casque, pas de lunettes, ni de chaussures de protection… Cette situation ouvrière l’amène à refuser le travail. Il quitte l’usine et se réfugie dans la baraque qui leur a été assignée. C’est alors qu’il est saisi par deux gardes en arme et ramené à son poste d’activité. Cette incartade lui sera néanmoins pardonnée par le contremaître qui lui indique que son refus était le premier et le dernier sur un ton très autoritaire, l’invitant à ne pas recommencer.

Quelques jours plus tard l’équipe à laquelle il s’est intégré, en possession d’une boussole expédiée par sa mère, décide de lever l’ancre, de fuir vers la Tchécoslovaquie, pour rejoindre à quelques 100 kilomètres les maquis Tchèques. Ce qu’ils ne réaliseront pas, l’administration allemande de l’usine ayant eu connaissance de ce projet intervient brutalement auprès d’eux et leur propose un marché. Celui proposé à René est d’embarquer sur un ravitailleur en pétrole à prendre au Japon pour ravitailler les bases de sous-marins allemandes, comportant une prime d’engagement de 500 marks. René Daunac a refusé ce marché qualifié par son camarade Hironde, de Magnagues (Lot), de marché de dupes. Il reprit donc son travail dans l’ignoble fonderie qui antérieurement avait été le bagne de prisonniers Russes. Quelques jours plus tard, une fausse manoeuvre du grutier fait renverser sur lui un moule très lourd et brûlant fondu la veille, qui le blesse et le brûle avant d’échouer sur une poutre qui lui sauve la vie. Cet accident fait de lui un invalide de la guerre avec statut de grand mutilé.

Après avoir été reconnu inapte au travail par le médecin chef de l’autorité allemande il est rapatrié sur l’hôpital de Montauban où malgré ses blessures de grand mutilé, son patriotisme le pousse le 19 août 1944, à se diriger vers le Rond où ont lieu les combats de la libération de la ville avec son camarade Georges Moulinou, cherchant, l’un et l’autre, à participer aux actions qui s’y déroulent et à se rendre utile face à cette situation inattendue pour eux.

Au lendemain du 20 août 1944, il se présente avec son cousin au bataillon Louis Sabatié en formation pour s’engager en vue des combats futurs de libération du pays. Son cousin est retenu et lui est refusé. Son désir de servir est alors anéanti. Plus tard, son engagement dans la marine n’étant pas terminé il est rappelé par elle et dirigé vers l’hôpital Purpan à Toulouse en raison de son état physique cause de son échec d’enrôlement quelques jours plus tôt à Montauban. Il y restera plusieurs mois avant d’être réformé et pensionné pendant trois ans jusqu’en février 1947.

René Daunac, patriote actif ne pouvant réussir à s’extraire du S.T.O. est envoyé en Allemagne où il se rebella, où il fut blessé, est une victime de la collaboration prônée par les vichystes et la milice, alors qu’il avait l’espoir de combattre l’Allemagne et ses alliés en s’enrôlant, en 1941 dans la marine.

Exceptionnel destin d’un patriote requis par le S.T.O.
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