Pages 53-57 du Livre « Afin que Mémoire Demeure »

Le Tarn-et-Garonne sous l’Occupation Allemande
Tract du mouvement « Combat » de 1942
Les agents britanniques du Colonel Buckmaster
Le S. O. E.
Le mouvement « Libérer et Fédérer « 
Manifestation gare Villebourbon 16 Mars 1943- 19 décembre 1943
Les jalons de la gloire

La France n’ayant pu contrecarrer l’avance allemande, envahie sur plus d’un tiers de son territoire, demande le 17 juin 1940 après un changement de gouvernement, l’armistice à la puissance nazis.

Il est signé le 22 et appliqué à partir du 25, l’Italie étant entrée en guerre contre les alliés un mois avant l’accepte à compter de cette dernière date.

La Grande-Bretagne se trouve dès lors abandonnée et « trahie ». La résolution contractuelle passée avec la Pologne de lutter contre Hitler, devient personnelle pour elle et inéluctable. Elle décide de poursuivre seule la guerre.

Cette nouvelle situation l’oblige à créer, la tâche à accomplir étant devenu immense sur tous les plans civils et militaires, de nouvelles sources de renseignements et à étoffer celles dont elle disposait partout dans le monde sans pour autant ignorer celles des pays de l’Europe occupés, lesquelles, d’ailleurs, lui fourniront de précieuses informations quand elles se seront partout organisées en réseaux et mouvements de la Résistance pour jeter le désarroi chez l’ennemi.

Cela était pour la Grande-Bretagne d’une nécessité absolue à cause de son isolement et de l’efficacité recherchée : actes de sabotage, prises d’armes, formation des résistants, fourniture de matériels, coordination des efforts dans l’action.

Dès le 22 juin 1940, Wiston Churchill confie au docteur Hugh Dalton, membre du « Labour parti » , ministre de la guerre économique et responsable du « Spécial Opérations Exécutiv »  la consigne de « mettre le feu à l’Europe ».

Pour ce faire, ce dernier confia à Sir Franck Nelson l’organisation de plusieurs sections concernant la France :

–    la section F (dite aussi Buckmaster),

–    la section R.F chargée d’appuyer les F.F.L.,

–    la section D. F responsable des routes d’évasion vers la Grande-Bretagne (Espagne et Suisse notamment),

–    la section E.U./P coordinatrice des communautés polonaises,

–    la section A.M.F créée à Alger après novembre 1942 pour la réalisation des actions dans le midi de la France et des groupes Jedburgh ayant pour tâche de coordonner le soulèvement armé des résistants selon les plans arrêtés par les alliés.

Les membres de ces sections étaient de plusieurs nationalités ; ils étaient capables de vivre à la française ou à la manière des pays dans lesquels ils opéraient en pouvant éventuellement se faire passer pour des citoyens du pays.

Des français illustres : Yvon Morandat, Pierre Brossolette, Jean Moulin, A. Dewavrin dit Passy, chef du B.C.R.A. étaient des membres actifs de la section F du S.O.E.

AFIN QUE MEMOIRE DEMEURE Tome2 Page54Le Tarn-et-Garonne et plus généralement le midi-toulousain, les régions de Lyon et de Marseille dépendaient du réseau « Pimento » (nom de code) ayant à sa tête le major Tony Brooks, (speudo Alphonse) .

Ce citoyen britannique en apprentissage en France, dans le Jura, en 1939, quittait cette région pour se rendre à Montauban chez Marcel Guerret, parent par alliance, et rejoindre Londres en passant par l’Espagne après un séjour à Miranda. Il arrive à Londres en octobre et s’engage en raison de sa connaissance parfaite de la langue française, dans le S.O.E.

Affecté à la section F du colonel Maurice Buckmaster, il y reçoit son indispensable formation d’agent secret et sera responsable des missions dont sera investi le réseau « Pimento ». C’est-à-dire : recruter, former et équiper en leur faisant parachuter des armes et du matériel des groupes indépendants susceptibles de remplir des actions diverses et/ou obtenir des informations plus particulièrement dans les milieux syndicaux et parmi les agents de la S.N.C.F

En mai 1944, il passait sous le commandement du Général Kœnig , premier général de carrière à recevoir la responsabilité des forces françaises de l’intérieur.
Michel COMTE AFIN QUE MEMOIRE DEMEURE Tome2 Page55-1
Dans la région de Toulouse dès 1942, il passe en Tarn- r et-Garonne et descend chez Marcel Guerret où il rencontre Jules Alamelle, Michel Comte, Monsieur Gasc du Fau , Yvon Bonis , Louis Rouère et quelques autres membres de l’ex-parti socialiste S.F.I.O. dont Raymond Tournou et son frère, ainsi que Louis Dutilleux et René Figarol, en plusieurs épisodes avant la constitution de noyaux autonomes directement impliqués dans la propagande et l’action.

AFIN QUE MEMOIRE DEMEURE Tome2 Page55-2C’est par l’intermédiaire de Marcel Guerret, qu’il obtiendra, en plus du gîte et du couvert, un emploi fictif chez Michel Comte, garagiste à Montauban – route de Toulouse, concessionnaire Berliet – lui permettant de circuler dans toute la zone libre et qu’il entrera en contact avec les membres du mouvement « Libérer et Fédérer », continuateur du réseau Bertaux créé en janvier 1941 par Pierre Bertaux, professeur d’allemand à la faculté des lettres de Toulouse, après de longues discussions politiques avec Gilbert Zacksas.
Garage de Michel COMTE

La mission « Pimento » dispose d’un opérateur radio ayant pour code « Emmanuel »- plan radio « Bratès »- parachuté dans la nuit du 5/6 février d’un halifax du squadron 161 venant de Tempsford et réceptionné par Henri Morandat, le frère d’Yvon, aux environs de Bourg en Bresse. Ce radio exercera son talent chez Michel Comte, Louis Dutilleux et Louis Rouère avant et pendant sa localisation à Lavaur chez Robert Marty.

Caza Roger était son nom. Il était né à Stanicet, province du Québec. Son chef « Alphonse  » (Tony Brooks ) avait été parachuté à Saint-Léonard de Noblat en Haute-Vienne le 1erJuillet 1942 et récupéré par un fermier du lieu, un nommé Léon Citerne.

En dehors des actions permanentes qu’il a menées ou animées, il a reçu de Londres , après le débarquement en Normandie , l’ordre d’empêcher l’embarquement , ou de le retarder, de la division « Das Reich » et de ses unités associées, en gare de Montauban. Cette opération consistait à vidanger le plus possible de boites d’essieux à roulements coniques Timkler et S.K.E, et à introduire une dose de carborundem dans les boîtes pour immobiliser les wagons. Elle fut réalisée par lui-même et Michel Comte.

La division « Das Reich » fut mise dans l’obligation de rejoindre le front de Normandie par la route après avoir été dans l’impossibilité d’être transportée par train. Harcelée régulièrement sur son itinéraire routier par les maquis et les résistants des régions qu’elle traversait.

Passant par Tulle et Oradour sur Glanes où certains de ces éléments commirent les plus graves forfaits : 99 pendus à Tulles , 642 morts à Oradour sur Glanes , tout le village dévasté et incendié, elle prit beaucoup de retard et n’arriva que bien après la consolidation de la tête de pont réussie par les alliés sur les plages normandes. Elle mit 16 jours pour aller de Montauban à Caen.

Tous les réseaux (ou sections) du S.O.E. créés de 1940 à 1944 n’ont pas eu le même destin, ni la même vie. « Pimento » lié à « Libérer et Fédérer », aux syndicalistes de la C.G.T et à ceux des syndicats chrétiens, aux cheminots résistants, eurent des actions déterminantes dans les liaisons et coordinations indispensables et sur celles du terrain : fourniture de faux papiers et de titres divers, ravitaillement, parachutages de l’armement, financement des coûts d’impressions des tracts et des journaux clandestins, rémunération de ses agents P1 et P2, les sabotages. Sur les 90 réseaux créés, 56 étaient encore actifs lors du débarquement des alliés en juin 1944.

Pour toutes ses actions de France, le S.O.E. avait homologué pour les activités dévolues à « Pimento » : 121 terrains de parachutage sur les 136 prévus par Maurice Buckmaster chef de la section F de 1941 à 1945, dont 79 dans la région de Toulouse ; 102 parachutages effectués dont 74 dans le département de l’Ain et 20 en Midi-Pyrénées, hormis ceux destinés à « Pimento » lui-même comme celui qui a eu lieu à Montauban dans la nuit du 1 -2 mai, dit du Fau, pas très éloigné du voisinage de Michel Comte.

Les transports aériens utilisés pour S.O.E. par la R.A.F étaient assurés par des avions basés à Tempford et Tangmère de marques : Westland Lysander, Lockheed Hudson, Douglas Dakota… 258 agents furent déposés en France et 433 ramenés en Angleterre, par les airs, sur les 1200 du service et 10000 tonnes d’armes et de matériels divers furent parachutés en France.

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AFIN QUE MEMOIRE DEMEURE Tome2 Page57-2jpgAFIN QUE MEMOIRE DEMEURE Tome2 Page57-3jpg

L’armement parachuté par S.O.E. ou expédié par des opérations maritimes, sans indiquer l’importance des explosifs ni celui des munitions, était composé par la mitraillette Sten (200 000 livrés) le fusil Lee-Enfield (128.000 livrés) et l’arme antichar P.I.A.T (1200 livrés).
Le premier agent de la section française du S.O.E. parachutés en France s’appelait Georges Bégué. Il était opérateur radio affecté au groupe de résistants fondé par les frères Philippe, Pierre et Jean de Vomécourt autour du socialiste Max Hysmans dans le département de l’Indre, parachuté le 6 mai 1941 dans la contrée de Valençay.

Le 6 mai 1991 (50e anniversaire de l’arrivée en territoire occupé de cet agent) André Méric, alors Secrétaire d’Etat aux anciens combattants et victimes de la guerre, et sa Majesté la reine Elisabeth, la reine mère, inaugurèrent un monument érigé dans un grand carrefour pas très loin du château de Valensay des 16e et 18 e siècles ayant appartenu à Talleyran-Périgord, en mémoire des 104 agents, dont treize femmes, morts en service actif en France dans des camps de déportés ou fusillés. André Méric m’y avait convié. A Westminster Abbey se trouve un monument dédié à tous les membres de S.O.E. de toutes nationalités morts pour la liberté et la libération de tous les pays occupés, inauguré le 13 février 1996 par sa Majesté la Reine Mère.

Le réseau Alphonse (Buckmaster) dit aussi « Pimento » exerçait son activité dans les départements de la Haute-Garonne, du Tarn, du Tarn-et-Garonne, dans l’Ariège et l’Aude, les Hautes et basses Pyrénées, le Lot, le Gers, dans la Corrèze, la Haute-Vienne, la Creuse, dans l’Allier, le Puy-de-Dôme, dans le Jura, la Loire, le Rhône, la Saône-et-Loire, la Haute-Savoie, la Savoie, dans l’Isère, la Drôme, la Lozère, dans les Bouches du Rhône, le Vaucluse, le Gard et dans l’Hérault ; il était composé de trente-deux agents P2 dont quatorze déportés et de 80 membres tués au combat, sans compter les militants de la base.

En outre chaque département recevait un chargé de mission de 1er classe et un de 2e classe, de nationalité locale ou étrangère.

AFIN QUE MEMOIRE DEMEURE Tome2 Page58jpgInauguration – 6 mai 1991

Reine d’Angleterre – André Méric, Secrétaire d’état aux anciens combattants

AFIN QUE MEMOIRE DEMEURE Tome2 Page59jpgQuelques membres du mouvement « Libérer et Fédérer »
autour du Major Tony Brooks à Toulouse
dont Jean Monier, liquidateur du mouvement après la Libération et son épouse,
Jean Durand et son épouse, Robert Marty et Madame, et Louis Olivet,

Le S. O. E.
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